Communautarisme, radicalisme, ghettoïsation, repli sur soi : notre société serait malade de ses particularismes. Un déficit de cohésion sociale conjugué à un manque de repère conduirait trop de jeunes vers des chemins de perdition. Branle-bas de combat du monde politique, inquiétude ; comment est-il possible que des jeunes belges aillent se perdent en Syrie, pourquoi vont-ils se fourvoyer dans une guerre qui n’est pas la leur ?
Sans sombrer dans l’angélisme, sans nier les problèmes, je reste extrêmement dubitative, devant cette mobilisation de «bonnes intentions» qui vise à combattre le radicalisme de certains jeunes.
Et tant pis si je prends le risque de déplaire, mais je ne peux m’empêcher de penser qu’il est plus facile de stigmatiser des jeunes qui s’égarent, que de s’indigner et d’agir, quand c’est l’Etat qui fait défaut.
Combien de vies, combien d’années perdues à l’aune d’un système scolaire profondément inégalitaire. Que de souffrances et d’humiliations endurées par ceux pour qui l’école est synonyme d’échec, de redoublement, de relégation ou encore d’exclusion. Il est évident que l’absence d’avenir, d’horizon, et de signes de reconnaissances constituent un terreau favorable à l’éclosion de tous les fanatismes. Nous avons tous besoin de dignité. Nous sommes tous en quête d’identité fière. Et si en la matière, je ne possède aucune formule magique, j’ai la conviction que la lutte pour l’égalité et la justice est le meilleur antidote contre toute aventure née de la désespérance.
Dans ce contexte, comment expliquer que la sélectivité sociale en œuvre dans le système scolaire et qui se joue pour l’essentiel à l’inscription, à l’exclusion, ou lors de l’orientation scolaire, fasse si peu parler d’elle ? Le colloque que nous avons organisé le 5 décembre 2012, et dont vous trouverez les actes vidéos ci-après, a principalement pour objectif de rendre visible et de mettre en mots la réalité de la discrimination sociale à l’école. L’ampleur de cette discrimination est, nous en avons la conviction, de nature à rompre le contrat social et ce d’autant plus que les principaux acteurs de celle-ci sont investis de la puissance publique. Il n’y aura pas de combat victorieux contre l’obscurantisme si l’école ne devient pas par excellence le lieu de l’égalité et de l’émancipation sociale. Il est légitime que les démocrates attendent de l’école qu’elle enseigne le respect de valeurs telle que l’égalité, mais il est vain et puéril de l’espérer si on laisse le système en l’état.
Loin de prêcher la résignation, nous gageons que ce colloque aura suscité une prise de conscience quant à l’acuité de la discrimination sociale en œuvre dans notre système scolaire, et qu’il nous permettra d’aborder celle-ci sous ses multiples facettes. Ce colloque, que nous avons conçu comme un colloque-action, devrait également amorcer des pistes d’actions, tant au plan juridique que sur le terrain.
Les “capsules” video que vous vous apprêtez à visionner sont porteuses de cet élan et de cette volonté !
Chantal Massaer
Directrice d’Infor Jeunes Laeken