eEn abordant la question de l’orientation des élèves et du libre choix de celui-ci, leur parcours semble totalement différent. Nos choix sont prédéterminés par des facteurs sociaux et, ce, depuis tout petit. Les jouets sont sexués, les savoirs et les compétences sont sexués, donc l’orientation est sexuée.

L’institution scolaire n’est pas immunisée contre l’émergence des stéréotypes et leurs impacts sur les comportements qui touchent toutes les strates de la vie quotidienne. On profile les garçons pour occuper des postes plus techniques et scientifiques  et les filles plus littéraires et  de sciences humaines.

 Lors de l’adolescence, la confiance en soi fait terriblement défaut. Les garçons comme les filles vont vouloir s’identifier à leurs pairs dans le choix de leur orientation. Le problème coince lorsque on est attiré par une filière dis du sexe opposé.

D’après une recherche organisée par la Direction de l’Egalité des Chances du Ministre de la Communauté Française portant sur les inégalités entre les filles et garçons. Trois décennies sont passées depuis la généralisation de la mixité dans les écoles mais le constat reste alarmant.

Si les filles sont aujourd’hui massivement présentes à l’école, elles sont en fait inégalement réparties dans les filières et les options.

La division sexuée de l’orientation n’est pas pour autant le seul produit du manque de diversification des choix des filles, la persistance des choix sexués étant  autant chez les filles  que les garçons.

Alors que les filles ont renforcé leur préférence pour la formation générale, filière dans laquelle elles restent aussi en moyenne plus longtemps, les choix des formations techniques et professionnelles ont par contre augmenté pour les garçons.

Et lorsque les premières s’orientent vers les filières qualifiantes, les choix sont clairement différenciés : les filles représentent par exemple 75% des inscrits dans le secteur « service aux personnes » en technique de qualification et 92% en professionnel, alors que les garçons constituent par exemple la quasi-totalité (98%) des inscrits dans les secteurs « industrie » et « construction ».

L’enquête  révèle également que les secteurs investis par les unes et par les autres ne sont pas non plus équivalents sur le marché du travail. Les filles s’orientent en fait globalement dans des filières et des options si ce n’est socialement moins valorisées, en tous cas professionnellement moins « rentables », c’est-à- dire menant à une insertion et une situation professionnelles plus difficiles.

Au niveau de l’enseignement secondaire général, elles ne représentent par exemple que 42,5% des inscrits dans l’option « maths fortes » qui comptent au moins six heures de mathématiques par semaine – option qui préfigure presque toujours des études universitaires longues.

Les choix des filières techniques et professionnelles sont soumis à la même logique sexuée: les filières de formation les plus porteuses professionnellement (avec le plus de débouchés et les plus rémunératrices) sont souvent très masculines tandis que les filles s’orientent majoritairement dans les filières du secteur tertiaire offrant des emplois plus souvent précaires.

Le choix précoce d’orientation entre une deuxième latine ou une deuxième générale n’arrange rien. Cela préfigure déjà ce mécanisme de séparation progressive des élèves puisque ce sont les élèves avec des performances scolaires moyennes ou faibles qui abandonnent la possibilité de faire du latin dès la deuxième année. Or, abandonner le latin signifie se fermer déjà deux portes sur cinq en troisième (les options « latin-grec » et « latin-sciences-math »).

 Et pour peu que les maths et les sciences ne soient pas le point fort de l’élève – que ce soit du point de vue « objectif » des résultats ou subjectif du goût, ce qui est beaucoup plus souvent le cas des filles –, il ne reste plus alors qu’une seule possibilité, l’option « langues modernes » (les deux dernières étant « sciences-math » et « éco-sciences »). Autrement dit, continuer en latin signifie se laisser toutes les portes ouvertes alors que son abandon équivaut à s’engager dans une trajectoire de restriction des possibles.

Une piste envisageable pour enrayer les choix d’orientation précoce serait l’allongement du tronc commun qui lutterait contre ces inégalités. Une manière d’éviter ou en tout cas de diminuer cette hiérarchisation  dans l’enseignement est de retarder l’heure des choix afin d’empêcher que les élèves qui éprouvent le plus de difficultés soient systématiquement orientés vers le qualifiant.

 Le tronc commun permet aussi d’éviter l’échappatoire facile en cas de problème : l’élève sait qu’il doit finir par y arriver et l’enseignant sait qu’il ne pourra pas réorienter et qu’il faudra donc mettre en place ce qui est nécessaire pour amener tous les élèves  sans exception à l’endroit voulu.

Dixon Lubikulu

Infor Jeunes Laeken

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