Trop d’enfants et particulièrement les enfants de milieu populaires sont relégués dans l’enseignement spécialisé. Quarante pourcents des enfants qui fréquentent l’enseignement spécialisé se retrouvent en type 8.

Les dys de tout ordre (dyspraxique, dyslexique, dysorthographique …) constituent le gros du bataillon des enfants orientés vers le spécialisé. Hors, de nombreuses études démontrent que ces enfants n’ont rien à y faire. Jusqu’il y a peu, rien n’était prévu à leur endroit en secondaire, de sorte qu’ils échouaient en type 1. Atteints de troubles de l’apprentissage, ils étaient subitement diagnostiqués comme présentant un retard mental léger, un problème d’adaptation sociale. Un véritable naufrage.

Il y a un an environ, nous publiions un web doc entièrement consacré à l’école inclusive. Le pari de celle-ci : inclure tous les enfants dans l’école « dite ordinaire », qu’ils soient porteurs d’handicaps, de troubles du comportement, de l’attention, de l’apprentissage ou plus simplement qu’ils soient issus de milieu populaire.

Sur papier, c’est l’émergence de cette école que la Fédération Wallonie Bruxelles appel de ces vœux. Toutefois, il y a loin de la coupe aux lèvres. L’on pourrait penser que la multiplication de plans d’intégration et le fait de rendre obligatoire l’implémentation d’aménagements raisonnables, concrétisent cette volonté. Nous serions donc sur le chemin de l’école inclusive. Sans vouloir minimiser nos enthousiasmes, il nous faut constater que la multiplication de plans d’intégration n’a créé aucun effet de substitution. Ainsi les plans d’intégration sont venus purement et simplement s’ajouter aux inscriptions dans le spécialisé.

Qu’adviendra-t-il à terme de la mise en œuvre d’aménagements raisonnables ? Il est trop tôt pour le dire. Dès à présent ceux-ci doivent être intégrés dans le plan de pilotage mais également dans le projet éducatif et d’établissement de l’école. Cela devrait permettre aux parents de prendre connaissance des propositions de l’école en ces matières.

Toutefois quels sont les parents qui lisent attentivement ces documents qu’ils sont par ailleurs amenés à signer ? Soyons de bon compte : nombre de parents de milieu populaire restent sous-informés. N’aurait-il pas été judicieux de proposer dès l’inscription, dans le formulaire adéquat, la prise en charge des besoins spécifiques des enfants. Cette pratique est courante dans l’enseignement supérieur et ou universitaire. Mais cet enseignement, on le sait, est fréquenté pour l’essentiel par les classes moyennes voire par les classes supérieures.

 La question demeure de savoir si répondre aux besoins spécifiques des enfants, dans les dispositifs prévus actuellement, va concourir à plus ou moins d’égalité ? L’orientation abusive vers l’enseignement spécialisé d’enfants de milieu populaire n’est plus à démontrer. Ses conséquences néfastes sont bien connues.

L’implémentation d’aménagements raisonnables pose la question du degré d’information et de sensibilisation des parents. L’on sait d’expérience que le capital culturel mobilisé par les uns et les autres n’est pas identique.

Répondre aux besoins spécifiques des enfants suppose, au-delà de la mise en place d’aménagements raisonnables, un continuum pédagogique et un dialogue école-parents qui est loin d’être acquis.

Si ces questions ne rencontrent pas l’attention qu’elles méritent nous pourrions voir émerger, à côté des écoles spécialisées, des écoles qui s’investissent massivement dans les aménagements raisonnables dès lors que d’autres cherchent à les contourner, avec pour conséquence : une segmentation encore plus sévère du quasi-marché scolaire. Pareille évolution pourrait avoir comme corollaire le développement d’un marché pur et dur où certains « experts » de l’apprentissage pourraient réaliser de juteux profits.

Chantal Massaer, Directrice

Infor Jeunes Laeken



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